GROUPAMA 4 • Volvo Ocean Race : Charles Caudrelier parle de la vie à bord

« La Volvo Ocean Race : Comment vivre 9 mois à 11 sur un bateau autour du monde ? • Groupama 4 »

Table ronde en présence de l’ethnologue Stéphanie Brulé-Josso et de l’équipier de Groupama 4 Charles Caudrelier.

À l’occasion d’une conférence à la Cité de La Voile de Lorient en présence de Stéphanie Brulé-Josso (Divers citéS), ethnologue spécialisée dans la vie à bord des bateaux, Charles Caudrelier est venu témoigner de son expérience sur Groupama 4. Quels sont les rites à bord ? Comment se répartissent les rôles à bord ? Analyse par une spécialiste.

Les rites

Stéphanie Brulé-Josso souligne qu’à bord, il y a différents niveaux de rites. Tout d’abord, le rite du passage de l’extérieur à l’intérieur. Charles : « Chaque marin a sa routine. 20 minutes avant de prendre mon quart, je me réveille, je mange, je m’habille soigneusement, je prends des barres de céréales et je monte sur le pont ». Chaque retour à terre est aussi soumis aux rituels : retrouvailles avec les familles, remise des prix, … Enfin, il y a aussi les rituels obligés, les rites de passage. Le plus célèbre d’entre eux reste le passage de l’équateur. « La tradition veut que chaque bizuth paye son tribut à Neptune pour avoir le droit de continuer sa navigation dans l’autre hémisphère. Les deux novices du bord n’y ont pas échappé. Ce moment reste un bon souvenir car il a apporté de la bonne humeur à bord alors que nous étions dernier de l’étape ».

Les plaisirs

« Les plaisirs sont assez simples à bord : un repas chaud, une blague, deux heures de sommeil d’affilé » témoigne Charles. Stéphanie souligne que les équipages capitalisent sur des occasions comme les anniversaires pour souder le groupe et partager des moments agréables. « À terre, on a des gens qui pensent et anticipent ce genre de choses. Pour mon anniversaire, Françoise qui s’occupe de la nourriture de l’équipe, avait glissé dans les sacs de nourritures de quoi faire des gâteaux pour l’équipage et un cadeau ». Les plaisirs sont possibles grâce à l’équipe à terre qui anticipe et répond à tous les besoins de l’équipage : « Notre force c’est d’avoir une équipe à terre à 200% qui anticipe chaque besoin de l’équipage. Je sais par exemple que tous mes déplacements ou ceux de ma famille sont assurés afin que je passe un maximum de temps avec eux dès mon arrivée. Pour les marins, c’est un stress en moins et du bien-être en plus, c’est donc forcément bon pour la performance. »

Les rôles à bord

L’ethnologue souligne que la société en mer est liée à la société à terre. On y retrouve donc la même organisation. « Chacun a son rôle à bord du fait de ses compétences et il y a un chef. L’image de l’entreprise se transpose assez bien au fonctionnement de l’équipage. Mais chacun a aussi un rôle social à bord ». Charles confirme qu’au delà du poste que chaque marin occupe à bord, de part son caractère ou son expérience, une position à part au sein de l’équipe. « Jean-Luc qui est le plus âgé d’entre nous prend plus de recul sur les conflits et apaise les tensions. Les jeunes sont plus intrépides et sont toujours les premiers à répondre aux sollicitations. Ce qui soude notre équipage c’est très certainement cette complémentarité des caractères et des rôles à bord. »

La peur

Charles n’hésite pas à dire qu’il a eu peur. « Dans l’étape du Grand Sud entre Auckland et Itajai, j’avais peur de casser Groupama 4. La casse dans ces zones du globe est dramatique car il n’y a pas de secours possible dans des délais courts. Mais je n’ai jamais cédé à la panique. Il y a toujours des équipiers qui n’ont pas peur, qui ont plus d’expérience du tour du monde et qui permettent de se dire « ça va le faire, il est déjà passé par là » ».

La pression

« Franck nous a toujours dit que nous étions venu sur cette édition de la Volvo Ocean Race pour voir. Donc je n’ai jamais ressenti la pression de terminer premier. Lorsque nous avons quitté Lisbonne pour Lorient en tête du classement général, j’ai un peu ressenti la pression de la course car tout le monde savait qu’une erreur pouvait anéantir toute chance de victoire finale. » Charles ajoute que l’équipe est en confiance mais n’hésite jamais à se remettre en question. C’est notamment ce qui a permis la progression de Groupama sailing team depuis le départ d’Alicante il y a 8 mois.

Charles réalise que dans 15 jours, c’est plus qu’un tour du monde qui se terminera. C’est une aventure de presque deux ans et demi avec une équipe de 50 personnes. « J’ai pris goût à l’équipage. On apprend énormément d’un point de vue humain mais aussi beaucoup grâce au partage de compétences. Même si je rêve d’avoir mon propre projet Vendée Globe, je ne dirai pas non à Franck s’il repart sur une Volvo Ocean Race ».

* Stéphanie Brulé-Josso, ethnologue
Ayant commencé ses études en sciences humaines à Nantes (Maîtrise de psychologie clinique), elle choisit de poursuivre sa formation anthropologique à Brest, seule ville universitaire bretonne accueillant un département d’ethnologie. En 1998, elle soutient un DEA sur « L’habitat plaisancier », souhaitant allier ses deux passions, le nautisme et les sciences humaines et sociales. L’ensemble de ces démarches donne lieu à la soutenance d’une thèse à l’UBO en 2010 sur « L’habitation du voilier de plaisance en croisière familiale. Anthropologie d’un espace et des gouvernementalités en jeu ».
Aujourd’hui, tout en continuant à publier dans des revues scientifiques (elle a écrit un article sélectionné pour le futur numéro d’Ethnologie française consacré à la Bretagne), elle développe une activité de Vulgarisation des sciences humaines et sociales auprès du très grand public

source de l’article : site web officiel du Team GROUPAMA 4 / Cammas

http://www.citevoile-tabarly.com/table-ronde-avec-charles-caudrelier-et-herve-le-quilliec

http://www.cammas-groupama.com/fr/Actualites/ActusVOR/actu_equipe_567.jsp